
Téléphone & santé : l’étude Cosmos scrute nos habitudes et leurs impacts
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L’usage intensif d’un smartphone influence-t-il le risque de cancers, d’accidents cérébro-vasculaires, de troubles du sommeil ? Cette question est au cœur de l’étude Cosmos-France. Alors que la technologie des téléphones mobiles et nos comportements évoluent, il est temps de suivre les changements dans nos habitudes d’utilisation. Un premier questionnaire a été adressé à près de 40 000 volontaires Constances en 2018-2019. Le questionnaire de suivi de cette étude est prévu en janvier 2025. Le point avec Isabelle Deltour, chercheuse au Centre international de recherche sur le cancer (Circ) de Lyon et co-responsable scientifique du projet avec Joachim Schüz.
COSMOS-France s’intègre dans un vaste projet international, avec des cohortes également en Suède, en Finlande, au Danemark, au Royaume-Uni, et au Pays-Bas. Le volet français de l’étude internationale Cosmos est mis en œuvre au sein de la cohorte Constances. Toutes ces cohortes sont basées sur le même protocole (mise en place, suivi, données utilisées) permettant de réaliser des analyses conjointes. C’est toute la force de cette grande étude !
Les premiers résultats de Cosmos-France viennent d’être publiés. Que montrent-ils ?
Isabelle Deltour : Grâce à l’engagement des volontaires de Constances, la France se distingue par sa forte participation au premier volet de l’étude COSMOS, surpassant les autres pays impliqués. Cette implication exceptionnelle garantit des résultats d’autant plus fiables pour la partie française de cette recherche internationale. Grâce à la participation des volontaires de Constances au 1er volet de l’étude qui a eu lieu en 2017 (pilote) puis 2018-2019, un portrait détaillé de l’utilisation des téléphones mobiles a pu être dressé mettant en évidence une grande diversité d’usages parmi les répondants, même si presque tous déclaraient utiliser un mobile pour passer des appels.
L’utilisateur type rapportait posséder un seul téléphone mobile et ne pas le partager avec d’autres personnes. En général, cet utilisateur passait entre 5 et 29 minutes par semaine en appels, utilisait rarement des écouteurs ou le haut-parleur, et n’avait pas recours aux applications de visiophonie. Cependant, les plus jeunes présentaient des profils d’utilisation du smartphone, des téléphones sans fil et des équipements connectés via les réseaux Wi-Fi, bien différents de ceux des plus âgés. Nous avons observé une diminution significative de l’utilisation autodéclarée des appareils connectés au Wi-Fi avec l’âge, à l’exception des liseuses électroniques.
Les réponses des hommes et des femmes de Constances pouvaient différer légèrement sur certains aspects. Par exemple, les hommes déclaraient en général avoir commencé à utiliser un mobile quelques années plus tôt que les femmes dans les années 1990. Pour les générations les plus jeunes, en revanche, il n’y avait pas de différence selon le sexe sur ce point. Ces éléments sont importants lorsque l’on veut étudier l’usage cumulé de téléphones mobiles au cours de la vie et son éventuel impact. Ces données, associées à celles de Constances (histoire et mode de vie), constituent la richesse de l’étude et la diversité des profils se reflète clairement dans les résultats de nos analyses.
Le questionnaire de suivi nous permettra d’étudier l’évolution des profils d’usage des répondants, d’autant que ces dernières années ont été marquées par de nombreux changements dans nos modes de communication.
Quelles maladies sont-elles étudiées ?
Isabelle Deltour : Cosmos est la seule cohorte épidémiologique internationale spécifiquement dédiée à l’étude des risques pour la santé liés à l’usage des téléphones mobiles. Le risque vis-à-vis des tumeurs du cerveau a d’ores et déjà été analysé, et les résultats sont rassurants : dans cette étude, ce risque n’est pas associé à l’usage de téléphones mobiles, même chez les personnes qui utilisent leur smartphone intensivement ou depuis longtemps. Ces résultats demandent à être confirmés pour les technologies les plus récentes (la 5G par exemple, introduite en 2020), pour lesquelles il n’y a pas encore le recul nécessaire. Les prochaines analyses porteront sur la fréquence d’autres problèmes de santé potentiellement très invalidants comme les maux de tête et les troubles du sommeil, en fonction de l’usage du téléphone. A plus long terme, les risques d’accidents vasculaires cérébraux et de pathologies neurologiques telles que la maladie de Parkinson, la maladie d’Alzheimer, la sclérose en plaque et la sclérose latérale amyotrophique seront également étudiés.
Quel est le rôle des opérateurs de téléphonie mobile dans cette étude ?
Isabelle Deltour : Depuis le début de l’étude, les opérateurs Orange, Bouygues Telecom et SFR contribuent au projet en fournissant, pour les participants qui y ont consenti, leurs volumes de trafic téléphonique : ceci permet d’avoir des données objectives (plus fiables que les estimations déclaratives) sur leur consommation téléphonique. Un accord de transfert de données est maintenant en cours de signature avec Free mobile, ce qui permettra de recueillir des informations auprès de cet opérateur de réseau mobile également ! Toutes les précautions sont prises pour garantir la confidentialité des données de Cosmos-France.
Référence bibliographique :
Deltour I, Guida F, Ribet C, Zins M, Goldberg M, Schüz J. (2024) Use of Mobile Phones and Radiofrequency-Emitting Devices in the COSMOS-France Cohort. International Journal of Environmental Research and Public Health. DOI: https://doi.org/10.3390/ijerph21111514